33ème Dimanche du TO - C
Frère Jean Mansir op
13 novembre 2016
Luc 21, 5-19
Quand on lit ce passage d’évangile selon Luc, on a franchement l’impression fort désagréable d’ouvrir et de lire notre journal quotidien ! De quoi désespérer… Et la première lecture de cette messe (livre de Malachie), nous y préparait déjà ! Travailler pour manger, nous enjoint saint Paul (2° lecture), travailler dans le calme, bon, mais sans bien voir où tout cela nous emmène…
Notre foi chrétienne est souvent ainsi rudement mise à l’épreuve, et l’évangile que nous lisions à la messe d’hier (Lc 18, 1-8) nous est bien nécessaire si nous voulons pouvoir conserver notre confiance en la Présence active de Dieu dans la vie du monde, dans notre vie, notre espérance en l’avenir de notre humanité, avec nous-mêmes… Rappelez-vous ce que, selon cet évangile, Jésus nous rappelait : « Et Dieu ne ferait pas justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit ? ». Si le juge inique finit par accorder justice à la vieille importune, comment Dieu ne ferait-il pas grâce à ses élus ? Priez donc… et pour cela, il faut la foi, la foi vivante, vivace.
Seulement voilà : la Foi, ce n’est pas toujours facile… surtout en des lieux et des temps de grandes déprimes ou de grands troubles sociaux, culturels, politiques… Non, la foi n’est pas facile, surtout tant qu’on en reste à la dimension intellectuelle de cette foi – ce que nous faisons bien trop souvent -, tant qu’on en reste à soupeser les choses, les événements, les personnes… à remuer et agiter tout cela, toute ces idées dans notre pauvre petit esprit !
Mais, à y bien réfléchir, la foi, au fond des choses, ce n’est pas cela ; c’est d’abord, c’est essentiellement, fondamentalement la confiance, celle de l’amour. Lorsqu’on aime et que l’on sait qu’on est aimé, la confiance est totale en le partenaire et en l’aventure de cet amour. Si on est dans l’amour, on ne peut douter de celui ou de celle qu’on aime et dont on est aimé, on ne peut douter de ce que l’on vit ensemble. On se donne soi-même tout entier, on se lance dans l’aventure. Don de soi en retour du don reçu de l’autre.
La vie s’enracine alors dans la confiance.
“Con – fiance”. “Fiance”, fiance réciproque, à deux ou davantage… c’est bien cela la foi ! (Littré : XIII° s. : État de l’âme qui se fie). Être “fiancé”, c’est bien nous par rapport à Dieu !
Dans l’étymologie latine, le verbe confier (du latin confidere : cum, « avec » et fidere « fier ») signifie qu’on remet quelque chose de précieux à quelqu’un, en se fiant à lui. Se confier, confier son avenir… Cette origine souligne les liens étroits qui existent entre la confiance, la foi, la fidélité, la confidence, le crédit, la croyance…
Et se rappeler ainsi tous les termes dérivés du latin fides (foi) et fidus (digne de foi) : se fier – fiable – fiance – fiancé…
Un des lieux bibliques de cette foi/confiance est bien le psaume 27 : « Le Seigneur est ma lumière et mon salut, de qui aurais-je crainte ? … Qu’une armée vienne camper contre moi, mon cœur est sans crainte. Qu’une guerre éclate contre moi, j’ai là ma confiance … Espère en Yahvé, prend cœur et prends courage, espère en Yahvé ! ».
Le défi que Dieu nous lance, à travers ce que nous sommes, personnellement, et à travers l’histoire que nous avons à vivre, c’est de croire en Lui, de croire en sa Présence active, ici et aujourd’hui, tout en ne nous réfugiant pas hors de nous-même où hors de l’histoire et de la société où nous vivons. Engagés dans ce maelstrom, nous maintenons, vivace en nous, la Foi-Confiance en Lui. Nous acceptons de ne pas comprendre, de ne pas dominer, de ne pas voir où tout cela s’en va…
C’est évidemment beaucoup moins confortable et gratifiant qu’une idéologie… Non, la Foi n’est pas une Idéologie, elle n’est pas un Système ! Elle est un engagement d’amour sur une Promesse.
« C’est par votre persévérance (votre confiance) que vous obtiendrez la vie » (évangile).