Lettre aux Amis de Chalais N°7
EDITO de la Prieure !
Laissons-nous toucher par la bonté sans limite de notre Dieu
Le Carême touche à sa fin et nous allons bientôt vivre la Semaine Sainte. En ce temps de contestations sociales, de guerre toute proche qui n’en finit pas, nous aspirons à l’apaisement. Me vient en tête cette homélie de st Jean Chrysostome que nous lisons au début de la Vigile Pascale :
« Que celui qui a travaillé dès la première heure reçoive à présent son juste salaire ! (…) Si quelqu’un a tardé jusqu’à la sixième heure, qu’il n’ait aucune hésitation, car il ne perdra rien ! (…) S’il en est un qui a traîné jusqu’à la onzième heure, qu’il n’ait pas honte de sa tiédeur, car le Maître est généreux, il reçoit le dernier aussi bien que le premier. Il admet au repos celui de la onzième heure comme l’ouvrier de la première heure. Du dernier il a pitié et il prend soin du premier. À celui-ci il donne ; à l’autre il fait grâce (…).
Goûtez tous au banquet de la foi, au trésor de la bonté. Que nul ne déplore sa pauvreté, car le Royaume est apparu pour tous. »
Bien sûr, il ne s’agit pas de nier le travail des ouvriers de la première heure, la peine qu’ils se sont donnée. La récompense pour l’œuvre accomplie est nécessaire. Mais peut-elle vraiment nous rendre heureux si d’autres, à côté de nous, sont laissés pour compte ?
En étant plongés ces jours-ci dans le mystère pascal, puissions-nous chacun et ensemble faire l’expérience de cette générosité de notre Dieu. Elle seule peut nous sauver et faire de nous un peuple réconcilié.
Dans cette newsletter, il est beaucoup question de notre accueil et de la rénovation de la maison Lacordaire. Ce projet qui nous occupe depuis l’été 2020 arrive à son terme, grâce à la générosité de tant de personnes. Et en premier lieu, grâce à vous, tous nos amis, qui avez répondu si généreusement à notre appel. Comment vous remercier !
Nous avons aussi été entourées par les conseils de nombreux amis et professionnels. Cette œuvre est vraiment une œuvre commune. Un Merci tout particulier à notre architecte, M. Pierre Douillet et à tous les artisans du chantier.
La maison ouvrira au public pour le week-end de l’Ascension, mais avant, pour ceux qui le désirent, vous êtes les bienvenus les 4 dimanches après Pâques à 10h30 pour la visiter. Enfin, samedi 13 mai à 13h30, nous avons prévu de remercier les amis de Chalais, avant la conférence du père Jean Massonnet à 15h.
Une nouvelle vie s’ouvre pour cette maison : qu’elle soit un lieu de paix, de fraternité, pour beaucoup !
sr Julie op
SOMMAIRE :
– Nouvelles de la communauté (suivre les liens)
– “Unanimes in domo” sr Marie de la Croix op
– “Les arbres de Chalais” sr Françoise op
– Un arbre, une maison (la maison Lacordaire) sr Geneviève op
– “L’arbre de la croix”
– “Maison de prière pour tous” sr Pascale et sr Marie Bernadette op
– Bloc-notes
NOUVELLES de la COMMUNAUTÉ :
Horaires de la Semaine Sainte ICI !
“UNANIMES IN DOMO”
Sr Marie de la Croix op
La première chose pour laquelle vous êtes réunis, c’est pour habiter unanimes en votre demeure et pour faire une seule âme et un seul cœur en Dieu.1
Unanimité… unité… uniformité ? Vous qui nous fréquentez à Chalais, savez bien que l’uniformité, au sens péjoratif du terme, n’est pas ce qui nous guette. De la couleur des chaussettes à la forme d’esprit, oui, vraiment, nous sommes là chacune avec toutes nos différences, et à la table d’hôtes, de même, nous tâchons de faire en sorte que tous se sentent accueillis pour ce qu’ils sont. C’est pourtant notre unité qui permet cette liberté.
La Règle de saint Augustin, adoptée au XIIIe siècle par les dominicains (l’une des plus anciennes qui soient, datant de la fin du IVe siècle, bien avant la Règle de saint Benoît) nous propose de vivre libres sous l’appel de la grâce et dans la bonne odeur du Christ. Elle peut se résumer à ce principe premier de l’évangile qui a pour nom la charité : l’amour de Dieu et du prochain, vécu dans le concret, à la maison.
La maison, qu’est-ce que c’est ? Et bien, c’est le lieu unique et familier du vivre et du couvert partagés, où l’on apprend à se respecter en profondeur dans l’inconnu de nos propres vies, à l’école du Fils, dans la confiance que Dieu nous veut là, pour le monde. Augustin insiste souvent : l’évangile n’est pas affaire de terreur sacrée, mais de relation ajustée. Ainsi, le jour de la Pentecôte, lorsque vient l’Esprit Saint, dit-il en suivant les Actes des Apôtres, les disciples “se trouvent rassemblés tous ensemble”. Or il ne les terrifia pas sur la montagne (comme au Sinaï), mais il entra dans la maison. Certes, vint du ciel un bruit comme un fort coup de vent. Il y eut du bruit, mais personne n’eut peur !
Notre unanimité, le fait de n’avoir qu’une seule âme, de ne faire qu’un seul cœur, réside dans notre projet commun : faire vivre ce lieu qui sent bon la maison de Dieu. Pour cela, pas de secret, mais se donner, donner le meilleur de soi, cahin-caha, se défaisant de toute illusion de grandeur, afin qu’il ne reste que la pierre nue, fondée sur le Christ, à l’image de notre édifice.
Unanimité ? Le mot fait rêver certains, il inquiète aussi (qu’on n’aille pas nous embrigader) !
La suite de la Règle est exemplaire : pour éviter les empoignades et les conflits sociaux, pas d’unité possible sans vraie mise en commun des biens. Pour créer le plus petit semblant de communauté, il faut mettre au pot commun et avoir soin de l’équité.
Ne dites pas « ceci m’appartient » ; mais que, pour vous, tout soit en commun. Que votre supérieur distribue à chacun le vivre et le couvert non pas selon un principe d’égalité – ni vos forces, ni vos santés ne sont égales – mais bien plutôt selon les besoins de chacun. Lisez en effet les Actes des Apôtres : Pour eux tout était en commun et l’on distribuait à chacun selon son besoin.2
1 Règle de saint Augustin, §1 (Livre des Constitutions des Moniales de l’Ordre des Prêcheurs).
” LES ARBRES DE CHALAIS”
sr Françoise op
Ce ne sont pas les arbres qui manquent à Chalais ! Si l’on regarde des gravures anciennes et même les premières photos de Chalais, on découvre que la forêt s’est, depuis, bien étendue au dépend des prairies. La vitalité de la végétation qui nous entoure est forte. Il nous est, par exemple, très difficile de contenir l’installation des broussailles au fond de la prairie sous le chemin du Belvédère.
Alors, comment les gérer ?
Il y a les arbres qui tombent tout seul, carrément déracinés, ou seulement amputés d’une grosse branche, en général au moins une fois par an : c’est la conséquence des tempêtes de vent qui agitent notre site assez régulièrement. En général nous trouvons des amis « bûcherons » pour régler le problème.
Il y a les arbres qui vont bien, grandissent tranquillement. Il faut parfois les élaguer pour limiter leur impact visuel.
Il y a les arbres vénérables, dont nous apprécions la présence et que nous contemplons souvent, comme dans l’allée Saint Martin. Il nous reste à ramasser les innombrables branches mortes tombées lors des tempêtes : nous apprécions quand des scouts sont là, à point, pour la corvée de bois !
Il y a « les mêmes » mais qui ont la mauvaise idée d’être plantés près d’un bâtiment, d’un câble électrique ou d’un fil téléphonique. Ils nous inquiètent… Deux solutions s’offrent à nous :
– un élagage qui diminue la prise au vent mais qui doit être fait régulièrement, avec un budget non négligeable.
– un abattage : cette décision est prise après avoir essayé d’évaluer le risque que l’arbre ne résiste pas à une tempête, et d’estimer les dégâts potentiels en cas de chute, ce qui n’est pas une science exacte ! C’est ce que nous avons fait cet hiver, en abattant deux tilleuls : celui planté par Lacordaire, qui a eu la mauvaise idée de le coincer entre la maison Lacordaire et l’église, dont la hauteur dépassait largement ces bâtiments, et un autre tilleul, planté lui aussi tout près de la maison, et plutôt envahissant pour les chambres des étages.
Mais rassurez-vous, la terrasse a encore des arbres pour vous accueillir sous leur ramure.
L’entreprise Baobab a géré ces abattages délicats avec dextérité, précision… et beauté ! J’aime regarder les cordistes évoluer dans les arbres et admirer leur travail en équipe pour trouver la meilleure solution à mettre en œuvre : du travail d’artiste !
“UN ARBRE, UNE MAISON”
Sr Geneviève op
Un « arbre de la liberté » à Chalais ?
Peut-être est-ce une légende ? Mais pour les moniales dominicaines qui habitent le lieu depuis 1963, ce tilleul proche de la Maison Lacordaire était bien un symbole de la flamme qui animait Lacordaire, le « refondateur » de l’Ordre Dominicain à Chalais au XIXème siècle.
Aussi, lorsque les frères dominicains quittèrent le Saulchoir pour Paris, ne sachant que faire de la statue de Lacordaire qui les avait suivis dans leurs divers lieux de formation, ils la donnèrent à la communauté de Chalais. Arrivée avec difficulté jusqu’à la terrasse où Lacordaire fit bâtir cette maison d’accueil, elle trouva naturellement place… sous l’ « arbre de la liberté »!
Les travaux de cette année 2023 et les nécessités de sécurité nous ont obligées à abattre cet arbre plus que centenaire, mais la statue reste en place pour veiller sur les lieux si chers au cœur du fondateur et accueillir tous ceux et celles qui viennent s’y recueillir et trouver la beauté, le silence et la paix.
Restaurer un lieu ? Est-ce tout mettre par terre et faire du neuf ?
Il me semble plutôt que c’est essayer d’entrer dans le projet que les premiers constructeurs s’étaient donné pour autant qu’on puisse l’approcher. Pour la maison Lacordaire, il nous a paru qu’elle faisait sans doute suite à la petite maison qui est proche de chaque Chartreuse pour accueillir les hôtes (rares, mais quand même !), souvent appelée « maison des familles ».
Sur certaines cartes anciennes on aperçoit un mini-bâtiment face à l’extérieur de la sacristie actuelle qui, on le sait, était la chapelle extérieure de la Chartreuse de Chalais. Sur le fronton, la date de 1731, celle du retour des Chartreux après les guerres de religion.
Que dire de cette maison si belle ? Sur la terrasse que Lacordaire jugeait, dans son emphase romantique, comme « la plus belle vue au monde » (de son monde !). Dans un courrier du 10 avril 1847 au Père Jandel, Lacordaire écrivait: « Au sujet de cet hospice, je vous dirais que j’aimerais mieux avoir là 10 bonnes chambres, cinq à chaque étage , que les 14 projetées qui m’ont parues bien étroites…» et un peu plus tard, nous trouvons dans une lettre à son amie Madame Swetchine : « Nous achevons de bâtir, à côté du couvent, sur une magnifique terrasse, un logement pour les étrangers. Le rez-de-chaussée contiendra trois salles de réception et chaque étage cinq cellules distribuées sur un corridor ».
Notre sœur Clémence (1902-2004) ajoute : « La partie cuisine et les chambres arrières ont été ajoutées par la famille Courbier (alors propriétaire du lieu) au moment où celle-ci augmentait. «La Bretagne» (plaque de cheminée du XVIIIème siècle ) a été descendue sur mulets de la Grande Chartreuse, don du supérieur de l’époque à la famille.» (dixit Mme Rollet, fille Courbier, à sœur Clémence dans les années 1980).
Alors nous avons voulu garder à cette maison son type extérieur déjà bien conservé et continuer sa fonction d’accueil, avec les normes actuelles, bien compréhensibles, mais… très coûteuses ! La simplicité souhaitée est souvent mise à mal par les impératifs de sécurité.
Nous souhaitons que toutes les personnes accueillies en ces lieux trouvent la paix et soient séduites par la beauté qui est don de Dieu .
” D‘UN ARBRE A L’AUTRE “
Si vous avez quelques minutes devant vous, rien ne vous empêche d’entrer dans l’église. Face à vous, à gauche de la grande fenêtre du fond, voici le Christ sur la croix. La croix, c’est l’arbre de vie. Le bois est de teinte verte et à chaque extrémité, vous verrez trois feuilles rondes. C’est un arbre aux branches “trifoliées”.
Étendu sur l’arbre, le Christ vous attend, les bras ouverts. Confiez-lui vos joies et vos tourments, il se charge de tout.
Inclinez-vous devant lui et allez en paix.
“MAISON DE PRIÈRE POUR TOUS”
Sr Pascale et sr Marie Bernadette op
La nouvelle équipe de l’hôtellerie tourne depuis maintenant presque une année. Il s’agit de sr Marie-Bernadette et sr Pascale, aidées de sr Geneviève et sr Marie de la Croix pour des permanences.
Nous avons eu la chance de reprendre dans une ambiance « post-covid » où très vite les mesures sanitaires se sont allégées, et surtout, les annulations de derniers moments comme « cas contact » se sont taries. Une gestion plus facile pour une équipe re-commençante (le tandem avait déjà fonctionné il y a 10 ans).
Nous avons maintenant retrouvé un passage régulier, et si nous ne sommes pas encore revenues à la fréquentation de 2019, c’est plutôt parce que la maison Lacordaire est en travaux. Nous voyons même revenir des demandes de l’étranger, et particulièrement, de bénévolat de jeunes de Brno en République tchèque, où le « bouche-à-oreille » à partir des anciens bénévoles s’est remis à fonctionner !
La rénovation de la maison Lacordaire nous a amenées communautairement à réfléchir à notre type d’accueil, et à réaffirmer notre souhait d’ouvrir largement, sans condition de ressources, dans la mesure où cela est compatible avec notre mode de vie monastique. Nous avons pris contact avec différentes associations pour proposer nos maisons (l’Ermitage et Lacordaire) à des groupes de personnes plus en précarité ou en situation d’exclusion. Certains projets sont en train de prendre forme. Et il y a aussi ceux qui viennent d’eux-mêmes comme l’association « Le Rocher- Oasis des cités » de Bondy (93) venue passer une semaine de vacances en février avec des jeunes de cités.
Nous constatons (sans tenir de statistiques !) le passage à l’accueil de personnes souvent loin de l’Église, mais avec de belles quêtes spirituelles ou habitées par des questions de sens. Dans quelle mesure les différentes crises réveillent ce questionnement, c’est difficile de le dire, mais il est très prégnant chez ceux qui nous visitent. C’est une vraie joie de les accompagner un petit peu et de prier pour eux, en tous cas ! Cela nous rapproche très concrètement des questions et des situations de nos contemporains. C’est une grâce pour des moniales.
VISITE de la MAISON LACORDAIRE
Le dimanche 16 avril et les 3 dimanches suivants (23, 30 avril et 7 mai) à 10h30,
il sera possible de visiter la maison Lacordaire.
Vous êtes les bienvenus !
BLOC-NOTES
Samedi 29 avril : Journée d’aide à l’entretien des extérieurs
Samedi 13 Mai 2023 :
13h30 : Dessert-café offerts aux amis de Chalais pour remercier de toute l’aide reçue autour du chantier
15h : Conférence par P. Jean Massonnet :
“Connaître nos racines juives, une promesse pour l’avenir.“
Mardi 8 Août : Solennité de Saint Dominique, Eucharistie à 11h30
Mardi 15 Août: Solennité de l’Assomption de Marie, Eucharistie à 11h30 et Procession à 17h
Dimanche 8 Octobre :
9h45 : Assemblée Générale de l’association des amis de Chalais
14h : conférence par P. Jean-François Chiron
Prochaines Fermetures de l’accueil :
– du 3 au 16 juin compris
– du 18 septembre au 7 octobre
– du 3 au 10 décembre compris