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25ème Dimanche du To B

Père Michel Mounier

Mc 9, 30 -37

Les trois lectures aujourd’hui convergent sur le péché humain.

La première met en évidence la racine même du péché : le refus de la Parole qui nous juge, qui nous dit où est le bon et où est le mauvais. Du coup nous nous préférons à la Parole. Autrement dit nous nous mettons à la place de Dieu. Prendre la place d’un Dieu que l’on voit avare de la vie et hostile à l’homme nous conduit évidemment à l’avarice et, par l’avarice, à l’hostilité à l’égard des autres.

C’est le thème de la lettre de saint Jacques qui fait découler tous les maux humains de l’envie et de la convoitise. Le point d’aboutissement de ce processus est le meurtre. Matthieu nous dira que c’est par envie que les grands-prêtres et les anciens livrent Jésus. Avec l’envie, la jalousie, nous ne sommes pas affrontés à de petits défauts, mais à la perversion majeure de la relation des hommes entre eux, accomplissement de la perversion fondamentale de notre relation à Dieu.

Tel est justement l’enjeu de la discussion des disciples. Par trois fois Jésus vient d’annoncer sa passion, son humiliation, sa descente à la situation du « dernier », du plus petit. L’incompréhension est totale. Les disciples convoitent en effet la place du plus grand. Mais qui est le plus grand, sinon Dieu lui-même ? Or qu’adviendra-t-il quand le plus grand s’avérera réellement pour nous le plus petit ? Il faudra que l’homme pécheur convertisse son regard sur Dieu : il n’est pas avare de sa puissance et de sa gloire ; il n’est pas le rival de l’homme mais celui qui donne et se donne. Il n’est pas ce juge impitoyable qui observe nos actes pour nous prendre en défaut, qui ne nous apprécie que lorsque nous souffrons et faisons des sacrifices. Quelle catastrophe, qui a fait tant de mal, que cette image de Dieu. Le Dieu de la vie, de la joie, du bonheur nous est difficile à concevoir : notre péché nous accable et nous rendons Dieu responsable de cet accablement. C’est le Dieu pervers dont nous parle Maurice Bellet. Il n’est pas trop d’une vie pour se débarrasser de cette image idolâtre.

Aujourd’hui il n’est pas pire crime que celui commis contre un enfant. L’actualité nous le rappelle douloureusement. Ce n’était pas le cas à l’époque de Jésus et il n’y a donc nul sentimentalisme dans son attitude. L’enfant devient notre modèle d’accueil du Christ parce qu’il sait, lui, qu’il a besoin de plus fort que lui. Accueillir l’enfant, c’est aujourd’hui accueillir le plus petit, le faible. Le Christ livré entre nos mains, nos règlements, nos lois. Au service du faible, nous revivons la démarche du Christ qui s’est fait le « serviteur de tous ». Alors nous devenons semblables au Fils de Dieu, lui qui exerce en tout la primauté nous dit Paul. Disciple du Christ, je suis en même temps, dans le même mouvement, le premier et le serviteur. Le premier parce que le serviteur, à la suite de celui qui s’est fait le Serviteur.

Paul nous le dit si admirablement :

« Jésus-Christ, lui qui est de condition divine, n’a pas considéré comme une proie à saisir d’être l’égal de Dieu, mais il s’est dépouillé, prenant condition de serviteur, devenant semblable aux hommes et reconnu à son aspect comme un homme, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort et la mort sur une croix. C’est pourquoi Dieu l’a souverainement élevé. »