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Fête du Baptême du Seigneur 2025

Fr Emmanuel Dumont op

Lc 3, 15-16.21-22

Aujourd’hui, Dieu est joyeux.
Peut-être que ce matin, la beauté de la montagne sous le givre le rend joyeux.
Mais, surtout, aujourd’hui, jour du baptême de Jésus, Dieu dit combien il a mis sa joie en Jésus. Alors, qu’est-ce qui le rend si joyeux en Jésus ?

La première chose qui rend Dieu heureux, c’est que Jésus est son messie, et que cette messianité, c’est aujourd’hui qu’elle est manifestée. Le messie, le christ, c’est celui qui reçoit l’onction qui manifeste la faveur de Dieu. Aujourd’hui, Jésus reçoit l’onction de l’Esprit Saint et Dieu lui dit qu’il a toute sa faveur.
Que Jésus est messie, Luc nous l’avait déjà dit. Les anges l’avaient dit aux bergers. Dieu l’avait dit à Syméon, l’ancien du Temple. Jésus est le Messie, le nouveau roi qui a reçu l’onction.
Ayant reçu l’onction, Jésus reçoit la puissance de l’Esprit, c’est ce que Luc nous rappellera en Actes 10. Et c’est avec cette puissance de l’Esprit que Jésus pourra réaliser les promesses faites par les prophètes, eux qui annonçait ce messie libérateur de tous les maux.
Mais cette puissance de Jésus, aujourd’hui, elle n’est pas très visible. Jésus ne semble pas avoir plus de puissance que les autres. Il fait comme tout le monde : il attend que les foules soient baptisées et il prie. Au fond, il est assez passif pendant le baptême. Luc ne raconte même pas qu’il remonte de l’eau comme le font les autres évangélistes.
On est loin d’un messie porteur d’une puissance virile et conquérante comme cela semble être à la mode chez les puissants de ce monde. Cela plaît aussi aux plus fragiles, par exemple aux détenus, qui sont parfois en prison parce qu’ils se sont crus tout puissants.
Au baptême, Jésus est aussi passif que lorsque la femme pécheresse lui lavera les pieds au chapitre 7 et pourtant, c’est dans ces moments qu’il révèle qui il est.
Jésus est passif au baptême comme il est passif à sa passion. Jean baptise Jésus même si Jean n’est même plus mentionné lors du baptême de Jésus chez Luc, comme Simon de Cyrène aidera Jésus à porter sa croix.
D’ailleurs, la première fois que la Bible mentionne un « fils unique et bien aimé », c’est à propos d’Isaac, le fils d’Abraham, qui acceptera d’être sacrifié par son père, et grâce auquel l’Alliance abrahamique sera vérifiée dans la foi d’Abraham. Isaac ne fait rien, ou plutôt, il fait confiance, comme son père, et ce n’est pas rien.
Et puis, n’est-ce pas lors de sa Passion que Jésus vainc la mort. C’est lorsqu’il est le plus faible qu’il est le plus fort. Alors, à nouveau, comme au baptême, le ciel s’ouvrira. Alors le messie nous libérera totalement des oppressions du mal, en nous libérant de la mort.

Jésus pourra nous libérer de la mort parce qu’il est non seulement un messie, mais le Messie, le Fils de Dieu. Et c’est la deuxième chose qui rend Dieu joyeux aujourd’hui : il nous manifeste que Jésus est son Fils.
Cela aussi, Luc nous l’avait déjà dit, depuis l’annonce à Marie. Mais aujourd’hui, Dieu le dit publiquement. Jésus est son Fils et il est le fils de Marie. D’ailleurs, l’Esprit joue un rôle dans cette filiation, c’est ce que nous dit l’Annonciation et que nous répète saint Paul au début de la lettre aux Romains.
Mais, là aussi, Jésus n’est pas l’héritier d’une puissance oppressive. Jésus est un héritier qui partage l’héritage.
Dans les lignes qui suivent, Luc nous dira que Jésus est aussi le fils d’Adam et d’Abraham. Dans ce contexte, quand au baptême, Dieu dit que Jésus est son fils, il nous dit que nous aussi, fils d’Abraham, nous serons adoptées par lui, par la puissance de l’Esprit.
Luc insiste sur cette solidarité avec les hommes dans son récit du baptême. Jésus a beau être le bien aimé, il fait comme tout le monde. Il est baptisé par Jean comme la foule. Et comme les hommes, il prie le Père.
Il y a d’autres indices dans ce sens dans le récit de Luc. L’image d’une réalité divine qui plane dans les cieux nous rappelle cette comparaison que fait le Deutéronome (32) entre Dieu et l’aigle qui protège sa couvée. Quand Dieu plane, il le fait pour un peuple à protéger. Et quand le livre de l’Exode parle de son premier-né, il ne parle pas d’une personne isolée, il parle du peuple Israël tout entier, qui souffre de l’esclavage en Egypte.
Aussi, aujourd’hui, à son baptême, quand Jésus est révélé comme fils préféré de Dieu, ce n’est pas seulement pour nous dire qu’il est spécial et différent de nous, c’est aussi pour nous dire que par Jésus, nous aussi, nous serons adoptés comme fils de Dieu.

C’est pour cela que le baptême est non seulement l’onction du Christ, non seulement la révélation de la filiation divine de Jésus, mais bien aussi une Nouvelle Création.
Dans la Bible, la première fois que nous avons vu l’Esprit de Dieu planer, c’était au début de la première création. La première fois que nous avons vu une colombe, dans la Bible, c’était avec Noé et la nouvelle création purifiée du mal que Dieu inaugurait.
En Jésus, aujourd’hui, s’inaugure une nouvelle Création. Luc nous dira plus loin au chapitre 17, que le Royaume est déjà là, au milieu de nous. Et c’est pour cela que l’ouverture du Ciel au baptême n’est pas seulement l’annonce de l’Apocalypse et de la venue du Fils de l’Homme dans les nuées, elle est vraiment l’inauguration d’un nouveau monde.
Cette année, il y a aussi eu des bonnes nouvelles. En particulier, en Syrie, nous sommes témoins de l’inauguration d’une nouvelle ère, d’un nouveau règne. Alors, certes, ce nouveau règne est plein d’inconnus. Mais en attendant, avec les habitants de ce pays qui ont fêté ce nouveau départ, réjouissons-nous, nous aussi.
Oui, une nouvelle création, cela se célèbre dans la joie.

Alors, oui, réjouissons-nous. Aujourd’hui est le jour de la grande manifestation : Jésus a été choisie par Dieu, il a reçu l’onction de l’Esprit Saint : il est le messie et le Christ. Jésus est le fils unique et bien aimé de Dieu. Il l’est pour nous, et il l’est avec nous. Nous, son peuple, nous les baptisés, nous la nouvelle création. Frères et sœurs, dans la joie, continuons notre mission messianique de fils et filles de Dieu.