
5ème dimanche du Temps Ordinaire C
P Michel Mounier
Lc 5. 1-11
Les trois lectures d’aujourd’hui présentent un trait commun : dans les trois nous voyons un homme prendre conscience de son inaptitude à remplir la mission que Dieu lui confie. « Malheur à moi, car je suis un homme aux lèvres impures » dit Isaïe. « Je ne suis pas digne d’être appelé apôtre » écrit Paul. « Retire toi de moi car je suis un homme pécheur », sollicite Pierre. Ne faisons pas de mauvaise spiritualité en nous édifiant de l’humilité de ces géants. L’enjeu, je crois, est tout autre : il s’agit de nous faire comprendre que l’annonce de l’Évangile, comme la création, part du néant. Déjà la virginité de Marie signifiait que produire la Parole, la mettre au monde, n’est pas au pouvoir de l’homme. La faiblesse du messager met en évidence le fait que Dieu est origine. Le messager est traversé par un message qui lui vient d’ailleurs, de Dieu. Destinataires de la Parole de Dieu, notre situation serait très incertaine si nous devions compter, pour nous faire croyants, sur les vertus humaines, la sainteté de ceux qui ont mission de nous transmettre la Bonne Nouvelle. Heureusement à travers eux, c’est le Christ qui agit. Du coup, en tant que porteurs de l’Évangile à notre tour, nous n’avons pas à nous inquiéter de nos lacunes et de notre condition de pécheurs, même si nous faisons de notre mieux pour la surmonter. Comme le charbon brûlant d’Isaïe, la Parole purifie à l’instant celui qui la profère avec sincérité. Nous avons entendu Paul nous dire : « Ce que je suis, je le suis par la grâce de Dieu ». Nos trois témoins ont vécu une expérience de purification. Isaïe avec le charbon brûlant, « maintenant ta faute est enlevée » ; Paul sur le chemin de Damas ; pour Pierre, qui a déjà dit : « éloigne toi de moi car je suis un homme pécheur », l’expérience du péché et du pardon ne trouvera son expression dernière qu’à la Passion. L’homme se trouve alors transformé tout en restant qui il est, heureusement le combat continue : Paul parlera de l’ange de Satan qui le harcèle ; Pierre se montera lâche devant les intégristes de l’époque et s’attirera les foudres de Paul – on n’avait pas peur de se quereller sérieusement.
N’hésitons pas à témoigner. La Parole authentique nous transforme en messagers authentiques chaque fois que nous la proférons. Le reste du temps, nous sommes des « serviteurs inutiles » et pourtant assumés par Dieu. Et cela change tout !