Saint Dominique, un homme de compassion
5 décembre 2004
Palencia : Dominique est un tout jeune homme. Il étudie la Bible avec passion, celle qu’il mettra partout dans sa vie.
Survient une famine qui ravage le pays. Dominique pose alors un acte qui dit déjà tout entier ce qu’il est : un être assoiffé de vérité et brûlant de compassion. Au cœur de la famine, sa vérité, c’est de donner tout ce qu’il a : ses livres, son « indispensable » pour étudier. Une goutte d’eau au regard de la famine qui sévit, mais par ce geste il donne son tout, comme il ne cessera de le faire sa vie durant.
La miséricorde est un trait déterminant de la personnalité de Dominique. Comme son Seigneur Jésus Christ, il souffre avec ceux qui souffrent, la misère des hommes le bouleverse. C’est un homme de cœur et s’il réagit, tout jeune, à la misère matérielle causée par la famine, il réagira plus tard à la misère morale de ceux qui se sont laissé entraîner dans l’hérésie. Il souhaitera même être vendu comme esclave en échange de l’argent nécessaire à un hérétique pour sortir de la situation dans laquelle il était enfermé.
Nombreux sont ceux qui l’ont vu pleurer comme Jésus sur Jérusalem, indifférente à son message d’amour. Dominique pleure en célébrant la messe faisant sienne la passion du Christ. Mais Dominique sait aussi consoler ceux qui pleurent, ses frères tout particulièrement. Il leur parle, les exhorte à reprendre courage et ses paroles sont si douces que les frères repartent consolés et réconfortés.
Il y avait en lui une très ferme égalité d’âme sauf quand quelque misère en le troublant l’excitait à la compassion et à la miséricorde (Libellus n°103)
Il accueillait tous les hommes dans le vaste sein de sa charité et, puisqu’il aimait tout le monde, tout le monde l’aimait. Il s’était fait une loi personnelle de se réjouir avec les gens joyeux et de pleurer avec ceux qui pleurent, débordant d’affection religieuse et se dévouant tout entier à s’occuper du prochain et à compatir aux gens dans la misère (Libellus n°107)
La prière de Dominique
Tout ceux qui ont connu Dominique ont été frappés par l’intensité de sa prière. Il passe, nous disent-t-ils plus de temps à prier qu’à dormir, parlant toujours avec Dieu ou de Dieu.
Comme un enfant plonge dans le sommeil, Dominique plonge dans la prière dès qu’il a un instant. Et c’est de tout son être qu’il prie, de tout son corps. Parfois il est humblement prosterné devant l’autel, souvent aussi il prie entièrement étendu, la face contre terre. Agenouillé, il contemple inlassablement la croix. Il aura cette confidence à un frère qui l’interrogeait sur le livre dans lequel il a le plus étudié : « c’est dans le livre de la croix, le livre de la charité, c’est lui qui enseigne tout ».
Dominique aime à prier debout devant le crucifix, les mains étendues devant lui à la façon d’un livre ouvert. Il prie aussi les bras en croix, paumes ouvertes vers le ciel, s’identifiant à son Sauveur.
Et ce n’est pas pour lui qu’il prie, mais par une grâce d’intercession toute spéciale, pour les pauvres les pécheurs, les affligés, qu’il porte dans le sanctuaire intime de sa compassion. Les frères l’entendent crier dans sa prière :« Seigneur, aie pitié de ton peuple !que vont devenir les pécheurs ? »
C’était pour lui une habitude très courante de passer la nuit en prière. La porte close, il priait son père. Au cours et à la fin de ses oraisons, il avait accoutumé de proférer des cris et des paroles dans le gémissement de son cœur…Une de ses demandes fréquentes et singulières à Dieu était qu’il lui donnât une charité véritable et efficace pour cultiver et procurer le salut des hommes : car il pensait qu’il ne serait vraiment membre du Christ que le jour où il pourrait se donner tout entier, avec toutes ses forces, à gagner des âmes comme le Seigneur Jésus, Sauveur de tous les hommes, se consacra tout entier à notre salut.(Libellus n°13)
Dominique et la Parole de Dieu
Dominique se donne avec ferveur à la prédication. Il exhorte et oblige les frères à annoncer la Parole de Dieu de jour et de nuit, dans les églises et les maisons, par les champs et sur les chemins, partout, et à ne jamais parler que de Dieu. Lui même se manifeste partout comme un homme de l’Évangile, en parole et en acte.
C’est dans les Écritures que Dominique puise l’ardeur de sa prédication. Infatigable prêcheur de l’Évangile, c’est aussi un fervent lecteur des évangiles. En voyage il ne se sépare pas de l’évangile de Matthieu et des épîtres de saint Paul. Il les étudie jusqu’ à les savoir presque par cœur.
Le bienheureux Fra Angelico nous a laissé une admirable fresque où il montre Dominique priant et lisant assis un livre sur les genoux. On omet souvent de montrer l’ensemble de la fresque. Or ce que Dominique contemple dans sa lecture c’est encore la passion du Seigneur : le Christ aux outrages.
Sans relâche, Dominique étudie l’Ancien et le Nouveau Testament, et il exhorte les frères à faire de même.
Telle était sa persévérance et son avidité à puiser dans les Saintes Écritures qu’infatigable quand il s’agissait d’étudier, il passait les nuits à peu près sans sommeil, cependant que dans le plus profond de son esprit, la mémoire tenace retenait dans son sein la vérité que recevait l’oreille. Et ce qu’il apprenait avec facilité grâce à ses dons, il l’arrosait des sentiments de sa piété et en faisait germer des œuvres de salut (Libellus n°7)
Dominique et la douceur de la fraternité
Sauf quand quelque misère bouleverse son cœur, Dominique a toujours le visage joyeux. Par cette joie, il s’infiltrait sans peine, dès le premier regard, dans l’affection de tous…Durant le jour, nul ne se mêlait plus que lui à la société de ses frères ou de ses compagnon de route, nul n’était plus gai.(Libellus n°104)
les témoignages sont nombreux de ceux et celles qui sont touchés par le rayonnement de sa personnalité ; les frères bien sûr, les compagnons de voyage, mais aussi les sœurs qui, les premières, se sont attachées à sa prédication en languedoc. L’une d’elle dira plus tard qu’elles n’eurent pas d’autre maître que Dominique pour les former à la vie de l’Ordre.
Dominique aide et visite les monastères qu’il a fondé. Il partage aux moniales ses succès dans la prédication et le recrutement de l’Ordre. C’est chez elles qu’un soir, tandis qu’il parle, il remarque que les sœurs ont soif. Il fait alors circuler une coupe de vin pour les rafraîchir, geste plein d’humaine sollicitude. L’une d’elle, sœur Cécile, nous laissera un touchant portrait de Dominique.
Taille moyenne, corps mince, visage beau et légèrement coloré, cheveux et barbe légèrement roux, de beaux yeux. De son front et de ces cils, une sorte de splendeur rayonnait qui attirait la révérence et l’affection de tous. Il restait toujours souriant et joyeux, à moins qu’il fût ému de compassion par quelque affliction du prochain. Il avait les mains longues et belles ; une grande voix belle et sonore. Il ne fut jamais chauve, et sa couronne de cheveux était complète, parsemée de rares fils blancs.