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Solennité de l'Ascension 2017 - A

Fr Benoît-Marie Florent op

Jeudi 25 Mai 2017

Matt 28.16-20

Vous venez de l’entendre : « Je suis avec vous jusqu’à la fin du monde ». Nous nous préparons à vivre par la liturgie le départ de Jésus, et lui nous apprend qu’il est au contraire très présent !

Pour nous figurer cette présence dans la séparation, voici trois images.
Tout d’abord, des amoureux sur le quai d’une gare, confrontés à l’apprentissage d’une autre présence, d’une présence au cœur, d’un autre rapport au corps.
De l’étudiant, du bachelier qui profite de ses révisions pour absorber ce qu’il doit connaître ou savoir-faire, qui doit lâcher ses notes de cours, son manuel, pour trouver en lui la ressource qu’il a emmagasinée.
Déchirement du départ du foyer de leurs parents de jeunes époux qui viennent de se marier, de l’étudiant qui va poursuivre son apprentissage plus loin, sans le refuge protecteur des siens…
Voilà plusieurs modalités de l’arrachement, du départ, de l’absence. Et pourtant, dans les trois modalités se joue aussi une présence dans l’absence. L’enjeu est d’en faire une présence qui ne soit pas régressive.
L’étudiant qui ne peut s’empêcher d’écrire une antisèche, qui ne lui servira probablement de rien, si ce n’est le rassurer faussement, car elle lui enlèvera en fait toute confiance dans ce qu’il sait.
L’amoureux qui garde de son aimée un objet, un souvenir qui le retient dans le passé, comme s’il s’agissait de saisir ce qui est en réalité insaisissable dans l’amour, et qui ne se dit pas en terme de possession…
Le parent qui ne veut rien changer de la chambre de son enfant quittant le foyer familial, comme s’il s’agissait d’enfermer un passé révolu, ou les jeunes mariés qui s’accrochent à une habitude familiale qui rassure.
Les disciples de Jésus, et nous avec eux, sont invités à faire ce saut dans l’absence qui fait grandir, et dans la présence non régressive.
Après avoir été plus ou moins patiemment des disciples de Jésus, le voyant vivre, l’écoutant parler, apprenant à réinterpréter l’Écriture, avec un stage accélérer entre Pâques et l’ascension !, les disciples sont invités à devenir des enseignants. Jésus précise dans l’évangile : faites des disciples… dans le livre des actes, Jésus précise : devenez des témoins. Soyez des prédicateurs, mais pas de simples répétiteurs, soyer des témoins. Dîtes ce que vous avez vu, mais vivez aussi ce que vous croyez.

La clef de la présence de Jésus, dans son absence, c’est l’intériorisation de toute sa Parole. Marie gardait ces paroles dans son cœur. C’est la confiance que ce qu’il nous a promis, il nous l’a déjà donné. « Les disciples parlaient avec assurance », c’est la confiance que l’œuvre invisible se déploie par la grâce de Dieu.
D’une certaine manière, l’Ascension, c’est la célébration de la maturité chrétienne. Peu de temps avant, Jésus appelait encore ses disciples ses petits enfants… L’Ascension fait passer de l’enfance de la foi, à l’assurance des témoins. L’absence de Jésus devient une force de liberté.
C’est alors que notre amitié avec Dieu, notre proximité avec le Christ peut se vivre comme celle des amoureux suffisamment confiants pour supporter l’absence temporaire du corps de l’autre.
C’est alors que notre mission d’évangélisation peut se vivre sans chercher à rabâcher une formule apprise, mais à enseigner une Bonne Nouvelle comprise de l’intérieur.
C’est alors que l’absence de Jésus dans sa condition commune permet de mesurer qu’il est bien présent avec nous, en nous, par nous, et que l’élévation de son humanité auprès de Dieu préfigure la gloire qui nous est promise.